Année : 2008
Réalisation : Xavier Gens
Avec : Karina Testa, Samuel Le Bihan, Estelle Lefebure, Aurélien Wilk, David Saracino, Chems Dahmani, Maud Forget, Patrick Ligardes
France, 2002, l'entre deux-tours des
élections présidentielles. Un "n'est-ce pas" retenti dans le pays des
fromages qui puent, Jean-Marie Lepen est qualifié pour le second tour.
Des émeutes éclatent un peu partout, des images annonciatrices d'une
autre rébellion qui surviendra dans les banlieues. Un petit groupe de
ouaich-ouaich se fait courser par les keufs t'as vu, avec un bon gros
tas d'euros entre les mains. Le frère de Yasmine, jeune femme enceinte
de l'un des fuyards qui l'a quitté il y a peu, se prend une bastos dans
le buffet. Son état force ses complices à le déposer dans un hôpital, où
il trouvera la mort. Il leur faut alors prendre la route pour rejoindre
Amsterdam où ils pensent pouvoir couler quelques jours paisibles. En
route, alors qu'ils approchent de la frontière luxembourgeoise, ils
s'arrêtent dans une auberge, où ils sont accueillis par une bande de tarés psychotiques. Mais rien n'y fait, les jeunots veulent se
reposer...
Premier film de Xavier Gens (tourné avant la
catastrophe Hitman), tout les problèmes du cinéma de genre français s'y
sont donné rendez-vous. Tout d'abord, et c'est la tare des auteurs de
l'horreur française, on tient là un scénario indigeste. Le fait que ce soit une production Europa Corp n'arrange
certainement pas les choses, et on a très vite la sale impression de se
retrouver devant un clone mal singé de tout ce qui a connu un certain
succès outre-Atlantique. Bien sûr, on pense à Massacre à la
Tronçonneuse, mais aussi à The Descent ou encore La coiline a des yeux.
Le truc, c'est que Gens a tellement bien digéré l'école Besson que ses
tics s'y retrouvent catapultés. Le début fait penser à un Yamakasi
épileptique et tellement bordélique qu'on ne comprend pas les
enjeux de l'histoire. Le paquet de pognon apparaît furtivement, on
devine qu'un des protagonistes vient de s'enfuir de taule. Le réalisateur préfère se
concentrer sur l'action foutraque et très cheap au lieu de nous
présenter ses personnages, en pensant que la seule situation suffira.
Grossière erreur.
Le message véhiculé
n'est pas clair. Frontières ? Celles de l'esprit blabla, ça c'est pour
les kékés. Non, le film dit simplement, en réduisant le champs de vision
du spectateur à cette auberge, que le France profonde est peuplée de
gros racistes responsables de la situation politique du pays alors que
la capitale se rebelle. Outre l'inexactitude crasse de cette pensée (ou en tout cas la non-maîtrise, on n'accusera surtout pas Gens d'être méprisant envers les provinciaux), il
faut surtout souligner l'incapacité de Gens à se poser des questions sur
son sujet, à gratter et chercher ce qu'il y a derrière les résultats
effrayants du Front National. Mais comme ça le forcerait à donner des réponses dont les
chances de passer la censure sont plus que pauvres, le réalisateur se couche. Il
se couche devant la toute-puissance de ceux qui lui demandent de
coucher sur l'affiche un message soit-disant informatif mais vraiment
mercantile.
Vide de tout engagement, clairement sans
couilles et inoffensif, le film compte sur son visuel avant tout. Alors
oui, la lumière est quelque fois sympa pour un tel budget. Seulement
Gens, tout comme il n'a rien à dire, n'a rien à montrer. Alors il tente
l'esbroufe, des mouvements inutiles pour se faire mousser mais sans
aucune utilité pour une narration rendue bancale. Ca tremblotte
et ça gicle, histoire de faire passer la pilule aux quelques âmes
perdues attirées par la seule affiche racoleuse. Mais même niveau gore
et action, c'est la grosse déception. Rien ne vaut cette réputation de
film ignoble, dégueulasse etc, l'amateur de barbaque en sera pour ses
frais.
C'est à se demander pourquoi ce film a pu
jouir, à l'époque, d'une telle couverture de la part de la presse
spécialisée ? Yannick Dahan, dans ses envolées lyriques si célèbres, a
oublié d'évoquer la performance des acteurs tout simplement odieuse. Il
faut voir la malheureuse Karine Testa jouant l'état de choc lors du
final. La direction a dû être celle-là : "t'as vu Star Wars épisode 3
hein, t'as vu la fin et la démarche de Darth Vader quand il imite Joe Cocker ? Ben tu me fais la
même, ça va être trop lol".
Rien à en retirer, à part une certaine lassitude : le cinéma d'horreur français ne peut donc rien donner de bon ?
Trailer
Interview de Gens et Testa au BIFF 2008
Extraits des premiers court-métrages de Gens
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